Par son ampleur, son caractère marqué et la grande variété de ses constituants, le bassin minier forme en soi un cadre de vie.
Son inscription sur la liste du Patrimoine mondial de l’Unesco confirme la reconnaissance de ce territoire selon cette conception.
De la candidature au projet de territoire
Le dossier de candidature auprès de l’Unesco est le fruit de plus de dix ans de travail : un inventaire extraordinaire a été dressé, des plans de gestion élaborés, les collectivités locales et les services administratifs se sont mobilisés.
Le dossier exprime au final une vision régionale, partagée et portée par les élus et la population. Gérer un ensemble patrimonial à cette échelle a imposé d’introduire l’urbanisme dans la réflexion et l’ensemble aboutit à un projet de territoire. En France, les projets d’ampleur régionale sont rares. Ils sont souvent imposés par la loi ou liés à une infrastructure d’envergure nationale. Dans le bassin minier, l’initiative est avant tout locale, sans référence à un cadre réglementaire. Cette candidature et le travail engagé pour la formuler constituent un formidable travail de planification qui ne dit pas son nom.
Envie, besoin, vision. et résilience
La candidature du bassin minier est d’abord une envie et un besoin. Ses premiers promoteurs, l’association du Bassin minier uni, l’ont vue dès le départ comme « une contribution au renouveau du bassin minier, un véritable levier tourné vers l’avenir, autour de trois enjeux étroitement imbriqués […] la connaissance et la reconnaissance du patrimoine minier […], vers un changement d’image […] le patrimoine et la culture minière comme outil de développement local ».
Ce territoire économiquement et socialement sinistré l’était aussi dans les esprits. Jean-François Caron, président de l’association, le rappelle en ces termes : « Le problème du bassin minier est d’abord culturel et comportemental. Pour que sa population puisse évoluer et s’adapter au monde actuel, il faut retourner vers son passé, ne pas le rejeter, mais au contraire bien le connaître pour avancer. » Il utilise le mot “résilience” à propos de cette inscription, mot qui souligne au propre et au figuré que le territoire a autant besoin de reconstruire son paysage que sa mémoire. Dans le bassin minier, la notion de monument retrouve ses dimensions mémorielles et fondatrices, les restaurations permettront aussi la réaffirmation du soi.
Les leçons d’aménagement du bassin minier
Le projet est centré sur le travail, la mémoire, la ferté des habitants, et contient des mesures concrètes qui ont changé le regard. La valeur universelle exceptionnelle (V.U.E.) s’applique sur des lieux de vie qui gagnent un statut valorisant. Cette patrimonialisation de ce qui était rejeté fait partie du processus de résilience. Le projet réussit parce qu’il est populaire, qu’il a un sens profond et des applications concrètes. Il a été porté par tous, notables compris. IL est devenu irrésistible. Maintenant, l’inscription sur la liste du Patrimoine mondial est un catalyseur. Obtenir ce label, c’est un peu comme accueillir les Jeux olympiques, ça fait rêver.
Enfin, les critères de l’Unesco ont impulsé une démarche porteuse d’avenir qui nécessite un travail considérable. Car on est là dans des impératifs internationaux, avec une procédure, des délais, une exigence élevée et des engagements. Il a fallu garantir que les biens inscrits seront gérés sur le long terme. Dans ces conditions, le projet du bassin minier a suscité un engouement collectif, au service d’un but difficilement négociable, en respectant un calendrier. La qualité intrinsèque des biens est l’essentiel mais ne garantissait pas l’inscription. Il a fallu une vision locale partagée, la persévérance, la capacité à se doter de services compétents pour porter la candidature, donner forme au projet.
L’avenir nous dira ce que deviendra l’enthousiasme de cette candidature. Il faut espérer qu’elle ouvre une nouvelle page du bassin minier, de son aménagement, de son économie, et surtout de ses habitants, parce que cette belle histoire s’est écrite avec eux et a élevé leurs lieux de vie au statut d’héritage pour l’humanité.
Jean-Pascal BÉZY
sous-direction de la qualité du cadre de vie - MEDDE